Edito du biopresse

Ce mot de gouvernance est devenu très à la mode ces derniers temps en France. J’ai demandé à des collègues quelle définition ils en donnaient et la réponse a été plutôt évasive… J’ai regardé dans mon encyclopédie Larousse de 1991 et le mot n’existe pas. J’ai interrogé Wikipédia et, bien que la réponse couvre 10 pages, la première phrase ne m’a pas étonnée : « Notion parfois controversée car définie et entendue de manière diverse et parfois contradictoire ».
Néanmoins, je retrouve ce que me semble recouvrir cette problématique à plusieurs échelles (régionale, nationale, européenne, mondiale) au sein du secteur de l’agriculture biologique. La question de fond est : qui prend les décisions ? Celui ou ceux qui prennent ces décisions sont-ils représentatifs ? L’éthique de l’agriculture biologique est-elle respectée ? Les décisions ne sont-elles pas prises ou ne risquent-elles d’être prises en fonction de critères uniquement économiques ou politiques, sans prise en compte des principes fondateurs de l’AB ?
En Auvergne, certains agriculteurs bio s’interrogent sur la place que les paysans bio pourront avoir dans l’avenir et comment leurs intérêts pourront être défendus, sachant que le contexte actuel amène des changements d’ordre économique (croissance de la bio), politique (nouvelle Pac, évolution des collectivités territoriales, Plan régional de développement de la bio…) et organisationnel (arrivée de nouveaux acteurs dans la bio ou augmentation forte de leur l’activité dans la bio). Ils s’interrogent ainsi sur le meilleur moyen de défendre leurs intérêts, leur garantir une indépendance, les appuyer techniquement, dynamiser les associations bio existantes et participer à l’organisation régionale de l’AB.
A l’échelle nationale, des réflexions sont menées dans ce sens, notamment sur la place des différents organismes intervenant en AB, et des dynamiques se mettent en place. Dans le cadre du RMT DevAB (Réseau mixte technologique sur le développement de l’AB), des réunions thématiques ont déjà eu lieu sur la veille et sur la formation, afin de mieux savoir ce que fait chacun, d’envisager des convergences et des synergies les uns avec les autres.
A l’échelle européenne, la gouvernance était également au coeur des réflexions qui ont eu lieu lors de l’Assemblée générale de l’AsAFI (IFOAM France), qui s’est tenue à Paris le 26 janvier. Le constat a été fait par les représentants de l’AsAFI à IFOAM Europe que la représentativité nationale des membres présents des autres pays était rarement assurée dans cette instance. Les représentants parlent en effet souvent au nom d’une seule structure, souvent économique (entreprise, organisme certificateur, gestionnaire de marque…). Si les membres de l’AsAFI se sont eux-mêmes, dans le passé, régulièrement interrogés sur le fonctionnement de leur association, ils se réjouissent aujourd’hui de la méthodologie adoptée pour gérer les alertes ou les points importants provenant de l’échelle européenne. Cette méthodologie, qui comporte des allers et retours par courriel avec les membres de l’AsAFI, avec des experts désignés par le groupe et souvent avec l’administration, des réunions, des traductions, des synthèses, permet de porter une voix française issue de la consultation de différentes composantes du secteur de l’agriculture biologique (producteurs, transformateurs, distributeurs, organisme certificateur, associations de développement ou interprofessionnelle et/ ou gestionnaires de marque, formation…). Par ailleurs, à l’échelle de IFOAM Europe, les paysans estiment qu’ils ont des difficultés à se faire entendre et à ce que leurs demandes soient prises en compte.
Ainsi, en ce début d’année, les équipes d’ABioDoc et du CETAB+ se joignent à moi pour vous souhaiter beaucoup de bonheur pour 2012 et la mise en place de gouvernances satisfaisantes à toutes les échelles et permettant efficacement et éthiquement le développement de l’agriculture biologique !


Sophie Valleix, Responsable d’ABioDoc

Numéro 174 - Janvier 2012


L’hiver au Québec est la saison idéale pour rattraper la lecture accumulée pendant l’été et pour participer à des colloques, des formations et des journées techniques. Souvent, on assiste à ces journées sans toutefois être convaincus de l’applicabilité de ces idées dans notre milieu de travail.
Régis Denis, président du club d’encadrement technique l'Envol-lait biologique et producteur bio dans le Bas-Saint-Laurent, a lancé un défi aux participants de la journée lait biologique tenue à Victoriaville (Qc) en janvier dernier. Il a invité les participants à faire preuve d’ouverture et d’écoute lors de ces journées thématiques. Souvent, on entend dans la salle : « Oui, mais chez nous on ne peut pas faire ça » ou encore « oui, mais ça ne s’applique pas à mon entreprise ». Par son défi, il a incité les gens à prendre ces mêmes situations et à les retourner. Pourquoi ne pas se demander plutôt « oui, mais comment ça pourrait s’appliquer chez moi ? » ou « qu’est-ce que je pourrais tirer de cette idée ? ». Cette réflexion personnelle permet de profiter d’un maximum d’information et surtout de s’ouvrir sur de nouvelles opportunités.
Le défi pourrait s’appliquer également à l’adoption de la norme biologique canadienne. Maintenant qu’elle est en vigueur au Québec, est-il possible de considérer les quelques contraintes qu’elle engendre comme des opportunités de développement pour nos entreprises? L’adoption de cette norme unique permet le commerce intra provincial et les échanges internationaux avec les États-Unis et l’Union Européenne. Cette démarche fournit une garantie au consommateur de l’authenticité des produits bio à travers le Canada. De plus, cette norme unique supprime la concurrence entre les provinces en ce qui a trait à la sévérité des normes. Afin de maintenir la croissance du bio au Québec, il est important de continuer ces démarches de transparence auprès du consommateur.
Dans un autre contexte, cet appel vers l’ouverture et l’écoute a été lancé par le maire d’une petite municipalité dynamique du Centre-du-Québec. Solidarité rurale du Québec était en tournée à Baie-du-Febvre, en février dernier, dans le but de recueillir les opinions de la population sur les grands défis et les voies d’avenir des communautés du Québec. Le maire a pris la parole et a dit aux participants : « Quand vous assistez à des rencontres comme celles-ci, écoutez et observez. Cependant, quand vous rentrez à la maison par la suite, posez-vous la question : Qu’est-ce que je peux faire de plus dans mon entreprise, dans ma communauté ? Qu’est-ce que je peux faire de mieux? ».
Le CETAB+ a fait la rencontre de Joseph Templier des Jardins du Temple lors d’un voyage en France en septembre dernier. La France et le Québec possèdent certes des différences quant au climat, à la durée de la saison de production des légumes et à la mise en marché, mais de nombreuses situations peuvent être source d’inspiration pour les uns et les autres. Ainsi, le CETAB+ a invité le maraîcher à donner une conférence sur le travail du sol en planches permanentes à Victoriaville. Près de 120 personnes ont assisté, le 15 février, à cet évènement qui s’est avéré très enrichissant. Bien que la technique ne s’applique pas intégralement aux conditions du Québec, les producteurs participants sont retournés à la maison avec la tête pleine d’idées et surtout avec le désir de transposer ces observations en opportunités de développement dans leurs entreprises.
Le CETAB+ et ABioDoc, par leur service de veille, veulent inspirer les producteurs et les intervenants en leur donnant accès à de l’information. Ces éléments, nous l’espérons, permettront de faire ressortir le meilleur de leurs entreprises et surtout de leur fournir des éléments de réflexion qui pourraient s’appliquer à leur milieu de travail! Bonne lecture!


Louis Rousseau, Chargé de projet - Veille technologique CETAB+

Numéro 175 - Février 2012


Le monde de la bio a bougé ces dernières années. Suite au Grenelle de l’environnement et au Plan de développement qui a suivi, l’agriculture biologique est sortie de sa marginalité pour trouver une notoriété. La petite niche dans laquelle certains voulaient la confiner est devenue une maisonnette et pourrait un jour devenir un palace. Les sceptiques de la bio n’ont qu’à regarder certains départements comme la Drôme ou certains pays comme l’Autriche pour comprendre que l’agriculture bio a un fort potentiel de développement sans que cela n’entraîne les catastrophes parfois annoncées, sanitaires ou économiques. Néanmoins, le premier flot important de conversions de ces dernières années va arriver au mois de mai, et un deuxième flot arrivera en mai 2013. L’impact sur le marché reste une inconnue. Si les acteurs « historiques » de la bio ont bien géré les conversions, et notamment les entreprises impliquées depuis plusieurs années dans les produits bio, certains acteurs ont flairé une bonne opportunité et se sont engouffrés dans le secteur bio, sans forcément prendre en compte les réalités du marché et l’évaluation du besoin de production au regard de la consommation actuelle.
Cependant, les bouleversements ne touchent pas seulement les entreprises. La majorité des acteurs de la bio s’interrogent quant à leur place dans ce nouvel ordre où progresse l’agriculture bio. Dans les départements et les régions, les producteurs biologiques et les acteurs de développement spécialisés en bio ont parfois des difficultés à maintenir la place qu’ils occupaient précédemment, tant par rapport à leurs activités qu’au financement de celles-ci. Les changements qui interviennent dans la gouvernance de l’agriculture bio ne se font pas toujours sans heurts. A l’échelle nationale, il semble qu’un certain consensus soit apparu au sein de la majorité des acteurs « historiques » de l’agriculture biologique, visant, dans ce monde en mouvance, à se « serrer les coudes » afin de maintenir vivaces les principes de l’agriculture biologique, d’accompagner son développement dans les meilleures conditions et de redéfinir les rôles des uns et des autres afin de répondre aux nouvelles exigences et aux nouveaux besoins nés des évolutions en cours. Dans ce contexte, beaucoup de choses sont à inventer, en termes d’organisation, de relations entre les structures, etc. Après avoir été perçu comme un levain d’idées en matière technique et économique, le secteur de la bio peut-il être un levain d’idées en termes d’organisation et de gouvernance ?
Lors d’un repas partagé sur le stand de l’Agence Bio, au Salon de l’Agriculture, Philippe Desbrosses nous a demandé si nous connaissions les cellules imaginales… Ce n’était pas le cas. Il nous a alors expliqué que ces cellules sont celles qui amènent la mutation de la chenille en papillon. Les premières cellules imaginales sont détruites par le système immunitaire de la chenille. Au fil du temps, elles deviennent plus nombreuses et finissent par entraîner la métamorphose de la chenille en papillon. L’analogie peut-elle être faite avec les personnes qui défendent une vision alternative du monde, dont les acteurs de la bio, et qui pourraient permettre d’impulser un changement profond de notre société… Jolie pensée en ce début de printemps !


Sophie Valleix, Responsable d’ABioDoc

Numéro 176 - Mars 2012


L’environnement n’aura pas été le centre d’intérêt des élections présidentielles françaises, loin s’en faut. Malgré les efforts de la Fnab et de son président, l’agriculture biologique a été peu citée par les candidats. Faut-il en conclure que ce mode de production est rentré dans les habitudes (vision positive)? Disons que la crise économique est passée par là… Néanmoins, si cette crise a ramené les électeurs vers des préoccupations plus éloignées de l’environnement, celui-ci pourrait se rappeler à leur bon souvenir lors d’accidents climatiques (sécheresse…), de pénalités imposées par Bruxelles concernant le mauvais état de la qualité de l’eau en France, etc. Cependant, il se pourrait que la prise en compte de l’environnement et de la santé provienne d’où on l’attend peu : des agriculteurs eux-mêmes. Des films et des documentaires relatifs aux dangers liés aux pesticides et à la puissance du système économique dont ils font partie sont produits depuis quelques années, dont notamment celui de Jean-Paul Jaud « Nos enfants nous accuseront ». L’association Générations futures alerte régulièrement sur ces dangers. Avec toutefois une inflexion… De plus en plus, les agriculteurs conventionnels ne sont pas présentés comme « les pollueurs » mais comme les victimes du système. Une manifestation a notamment eu lieu dans ce sens au Salon de l’agriculture en février dernier, orchestrée par Générations futures et donnant la parole à des agriculteurs malades des pesticides. Un documentaire a été diffusé le 17 avril sur une chaîne nationale. Si la position consistant à considérer les agriculteurs comme des pollueurs se traduit naturellement par une crispation, celle qui les montre comme des victimes pourrait éveiller les consciences et ouvrir la parole. Il me semble en effet que les agriculteurs touchés dans leur santé ou celle de leur famille par les effets négatifs des pesticides sont plus nombreux qu’on pourrait le croire. Néanmoins, pour ceux qui sont encore en activité, il leur est difficile de changer radicalement de système de production, d’autant plus que les techniques qui permettent de se passer des pesticides ont été en partie oubliées, que certains de leur entourage professionnel n’y ont pas intérêt et que, notamment pour les céréaliers, la notion de production suffisante est très ancrée et souvent accompagnée de la responsabilité de « nourrir le monde ». Sur cette dernière vision, la divergence est grande entre les productivistes et les écologistes, ces derniers mettant plutôt en avant le droit des peuples à se nourrir eux-mêmes. En revanche, sur la notion de production suffisante à l’échelle française (rappelons que les rendements en céréales biologiques, en France, sont nettement inférieurs à ceux de l’agriculture conventionnelle, même si ce n’est pas le cas pour toutes les productions), la responsabilité d’instaurer un modèle plus écologique n’incombe pas qu’aux seuls agriculteurs, mais à l’ensemble de la société, car cela implique de revoir l’organisation du territoire, de sauvegarder les bonnes terres agricoles et de revoir les modes de consommation (moins de viande, plus de produits locaux et de saison…).
Quoiqu’il en soit, il me semble important de diffuser les techniques de l’agriculture biologique et de l’agro-écologie (agroforesterie…), sans crisper mais en favorisant une réflexion plus globale, afin de préserver la santé en général, celle de l’environnement et celle des personnes, dont les plus exposées, les agriculteurs.


Sophie Valleix, Responsable d’ABioDoc

Numéro 177 - Avril 2012


La commission de protection du territoire agricole du Québec (CPTAQ) vient de prendre une décision importante en matière de morcellement du territoire agricole. Cette ouverture facilitera la vie de jeunes de la relève désirant s’établir en agriculture.
Un couple de jeunes producteurs maraîchers biologiques (Ferme aux petits oignons) a fait la preuve que leur entreprise de 4 hectares pouvait être rentable et viable. Ainsi, suite à l’analyse de leur dossier, la commission a autorisé le morcellement d’une terre agricole afin que ces jeunes maraîchers puissent s’en porter acquéreurs. Cette décision est encourageante pour plusieurs jeunes de la relève qui ne possèdent pas de terre et qui voudraient démarrer une entreprise agricole. L’accès à la terre s’avère être un enjeu important pour l’établissement de la relève agricole au Québec.
Il faut se rappeler que la CPTAQ a comme mission « d’assurer la protection du territoire agricole et contribuer à introduire cet objectif au coeur des préoccupations du milieu ». La crainte exprimée par la CPTAQ dans de dossiers similaires est que des gens morcellent le territoire agricole dans le but de ne pas le cultiver et par la suite, favoriser son dézonage (changement de vocation du territoire). La protection du territoire agricole est particulièrement importante à proximité des centres urbains là où la spéculation sur les terres agricoles est forte. Celle-ci provoque une hausse importante du prix des terres, mais à des fins autres qu’agricoles !
Véronique Bouchard, copropriétaires de la Ferme aux petits oignons, et plusieurs autres jeunes de la relève agricole croient que l’agriculture du Québec est en pleine évolution. De nouvelles formes de mise en marché voient le jour, de plus petites surfaces sont cultivées, et ce de façon rentable, etc. Bien sûr, ces activités agricoles ne domineront jamais les grandes productions, mais plus la population s’intéressera à ces nouvelles façons d’occuper le territoire, plus celles-ci prendront de l’importance. N’est-ce pas là la plus belle façon de contrer l’abandon et la transformation des terres agricoles en les occupant par l’agriculture et en sensibilisant la population à l’importance de celle-ci?
Il est encourageant de constater, à travers cet exemple, que plusieurs modèles d’agriculture sont encore valorisés. Le ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Pêcheries du Québec (MAPAQ) a mis sur pied en 2011 un programme pilote d'appui à la multifonctionnalité de l'agriculture. Le but de ce projet est de valoriser d’autres facettes de l’agriculture telles la valorisation de bâtiments agricoles, l’implantation de haies brise-vent, la remise en culture de terre en friche dans des régions où l’agriculture est moins intensive.
L’agriculture continuera de se transformer et nous verrons apparaître sûrement d’autres façons d’occuper le territoire, à travers des fermes à vocation sociale, des circuits agrotouristiques, de l’agriculture à des fins d’éducation, etc. L’agriculture apporte à la communauté beaucoup plus que la production de nourriture!


Louis Rousseau, Chargé de projet - CETAB+

Numéro 178 - Mai 2012

 


L’approche pluridisciplinaire est maintenant largement plébiscitée, aussi bien dans la recherche, l’enseignement que dans les entreprises. Cette approche, qui consiste à faire travailler ensemble des personnes d’origines diverses, par la formation, la structure professionnelle, la profession…, permet d’élargir la vision, de faciliter la résolution de problèmes et d’encourager l’innovation.
Or, les personnes issues de secteurs différents ont parfois du mal à se comprendre, à parler le même langage et à fonctionner de concert. A cet égard, tous les moyens qui favorisent la mise en contact de personnes d’horizons différents sont intéressants. Les Rendez-vous Tech et Bio qui ont eu lieu en juin, sur l’élevage dans les Pays de la Loire et sur la viticulture en Aquitaine, et qui réunissent des conseillers de Chambres d’agriculture, des enseignants, des agriculteurs, des chefs d’entreprise…, sont un outil intéressant pour favoriser la rencontre, la connaissance entre acteurs de la bio et faire émerger des collaborations futures.
En agriculture biologique, la mise en place de structures de concertation, à l’échelle d’un territoire ou d’un secteur d’activité, permet également de favoriser ce travail pluridisciplinaire (interprofessions, structures de coordination…). Le Pôle AB Massif Central, qui coordonne la recherche et la recherche-développement en AB à l’échelle du Massif central, est une telle structure qui rassemble, au sein de projets, diverses organisations.
Avec un même nom, mais sur des critères différents, cette association a organisé, à Rodez, le 18 juin dernier, les Rendez-vous du Pôle AB Massif Central sur la thématique des références en agriculture biologique. Ces rencontres ont réuni, en plus petits comités, des chercheurs, techniciens, animateurs, formateurs, administratifs… Répartis en trois ateliers, sur la finition des ruminants, l’élevage en général et les productions végétales, les participants ont pu émettre leurs idées et leurs points de vue et faire émerger des projets de programme de travail. Grâce aux horizons multiples des participants, qui provenaient de différents secteurs d’activité et de différentes zones géographiques, les connaissances et les dispositifs existant chez les uns et les autres ont pu être mis en avant, ainsi que les besoins, tant dans les domaines des références nécessaires que dans la valorisation attendue, mais aussi les apports et les divers moyens que chacun pouvait mettre en oeuvre dans le cadre d’un futur projet européen.
Dans le but similaire de favoriser la mise en réseau des acteurs de différentes origines, tant par secteur d’activité que géographique, ABioDoc a restructuré en 2011 sa base des acteurs de la bio, orientée recherche, formation, développement et animation, où chacun peut s’identifier et renseigner ses données. En 2012, ABioDoc a favorisé l’indexation de plusieurs acteurs européens dans cette base de données. Il a également édité « L’annuaire des organismes européens de la bio », qui présente, pour chaque pays européen (Union Eu et hors Union Eu), une liste des organismes travaillant en bio, ainsi que leurs coordonnées. Il présente aussi un résumé de la situation nationale de chacun des pays, au travers d’un bref historique de l’AB dans le pays, des principaux chiffres, du marché et de la structuration de la filière.
Cet annuaire, ainsi que la base des acteurs de la bio, ont pour objectif notamment d’aider les étudiants, enseignants et conseillers qui souhaitent effectuer un stage ou organiser un voyage d’étude sur l’agriculture biologique dans un pays européen. Ils doivent aussi favoriser les prises de contacts entre personnes d’organismes et de pays différents et aboutir si possible à la mise en place de projets en commun.


Sophie Valleix, Responsable d’ABioDoc

Numéro 179 - Juin 2012


Le Printemps Bio a accueilli cette année de nouvelles initiatives pour promouvoir l’alimentation bio, notamment en Rhône-Alpes : apéritifs, repas et dégustations dans les restaurants d’entreprises et maisons de retraite, « parcours de découverte de la bio » fédérant de nombreuses entreprises, fermes et magasins bio dans la région lyonnaise, ateliers oenologiques...
Pour autant, nous avons encore besoin de faire connaître les « plus » de la bio. Au-delà des préjugés (bio chère, végétarienne, effet de mode…), la bio souffre de sa «modestie d’affichage», alors que les nouveaux consommateurs ignorent souvent tout des procédés de production et de transformation propres au bio. Cette année, deux nouveaux cahiers des charges bio sont entrés en vigueur, sur des marchés en expansion : la vinification, pour lequel il aura fallu de nombreuses années de discussions avant son aboutissement, et la restauration commerciale. Des restaurateurs pionniers s’approvisionnent déjà totalement en bio et vont pouvoir enfin le valoriser officiellement. En revanche, l’application de ce cahier des charges va demander une vigilance toute particulière des organismes de contrôle et de la DGCCRF (1). Nos organisations auront aussi un rôle important à jouer pour la formation des acteurs économiques.
Corabio et Bioconvergence, deux organisations de coordinations rhônalpines en bio, lors de leurs récentes assemblées générales, ont plaidé pour une bio exigeante, transparente et offensive. L’agro-alimentaire conventionnel vient concurrencer par tous les moyens les produits biologiques, y compris par des communications parfois abusives, de « fabrication artisanale », « produits d’ici », « naturalité bonne pour la santé ». Face à cela, les fabricants bio doivent afficher d’une manière plus forte des messages objectifs, issus des fondamentaux de l’AB, en termes de protection de l’environnement (sols, air, eau, sans OGM…) et par delà même, en termes de santé (interdiction de produits chimiques de synthèse reconnus comme dangereux : pesticides, colorants, exhausteurs de goût, solvants….).
Dans ce combat, la distribution bio a aussi un rôle pédagogique important à jouer par la diffusion d’informations vis-à-vis des consommateurs. Enfin, face à la critique sur l’efficacité du bio, il existe de nombreuses études (2) et un nombre de plus en plus important d’agronomes à travers le monde qui reconnaissent que l’agrobiologie est LA solution d’avenir.

(1) Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes
(2) Etude du Commissariat général au développement durable sur le coût des principales pollutions agricoles de l’eau, Ministère de l’Ecologie, n° 52 de septembre 2011, www.developpement-durable.gouv.fr ; Etude de la FAO : www.fao.org/newsroom/fr/news/2007/1000550/index.html.

Maria Pelletier, présidente de Bioconvergence
Françoise Reiller, présidente de Corabio

Numéro 180 - Juillet / Août 2012
Edito repris d’Alternatives Bio n°59 de juillet 2012


Le 12 septembre 2012, le Pôle agriculture biologique Massif Central avait organisé une journée technique consacrée à l’autonomie alimentaire des élevages biologiques. La volatilité des prix des céréales rend cette thématique parfaitement d’actualité en élevage, et d’autant plus en agriculture biologique où les coûts des compléments alimentaires (énergétiques et azotés) sont plus élevés. L’autonomie alimentaire s’intéresse à la fois aux fourrages et aux compléments. Dans le Massif Central, l’herbe est très présente dans les rations des ruminants mais l’autonomie fourragère est parfois compliquée à atteindre, soit dans les zones froides où les stocks hivernaux doivent être importants, soit dans les zones plus sèches du sud du Massif où la pousse estivale est très faible. L’augmentation de la fréquence des années sèches renforce les difficultés. Concernant les compléments alimentaires, la difficulté est encore renforcée car certaines fermes de montagne ne disposent pas de terres cultivées. Des éleveurs de montagne réfléchissent à la mise en place de céréales en altitude (au-delà de 1000 m) afin de fournir de la paille et de mieux finir les animaux, certaines céréales pouvant s’adapter. Cependant, la PAC qui réglemente le retournement des prairies peut aussi représenter un frein au retour en rotation de prairies de longue durée. Une autre solution est la contractualisation avec des exploitations proches, situées dans les vallées par exemple (cette contractualisation existe aussi parfois pour le fourrage). Enfin, dans les zones difficiles, une bonne stratégie commerciale (intégrant la vente directe notamment) peut compenser les handicaps naturels. Aujourd’hui, des producteurs, des techniciens, des chercheurs et des enseignants travaillent main dans la main pour trouver des solutions, avec des projets qui concernent la conduite du pâturage, l’utilisation des parcours, les variétés rustiques de pays, les prairies à flore variée, la finition des animaux, etc.

Des exemples d’organisation de l’autonomie à l’échelle d’un territoire existent aussi au plan national, notamment dans la filière des monogastriques biologiques. Ces organisations réunissent des groupements de producteurs, des transformateurs et des distributeurs.

A l’échelle nationale, l’autonomie alimentaire en agriculture est également d’actualité, et pas seulement du fait de la volatilité des prix des céréales. De nombreux animaux d’élevages sont nourris avec du maïs et du soja dont une part contient des OGM. L’étude récente du professeur Séralini relance le débat et renforce les doutes des consommateurs sur le sujet. Plus globalement, il serait cohérent de nourrir nos ruminants essentiellement avec des fourrages, et de l’herbe notamment, et de complémenter avec des céréales et des protéagineux produits sur le territoire national. Cela éviterait de spolier les terres de paysans des pays du Sud pour y implanter du soja et de les envoyer dans la misère. Néanmoins, cela supposerait notamment de repenser les territoires (et de profiter au mieux de toutes les surfaces utilisables pour l’élevage, telles que les landes, les friches, les bois…), et éventuellement d’affecter plus de terres, en France, à l’alimentation animale (et notamment aux protéagineux). Cependant, ce dernier point implique de remettre notre système alimentaire en cause car les surfaces ne sont pas extensibles et l’efficacité des céréales est moindre lorsqu’elles sont consommées par les animaux d’élevage que lorsqu’elles sont consommées directement par les humains. Parmi les pistes pour y arriver, une des solutions est de limiter le gaspillage alimentaire (ce qui est d’ailleurs une nouvelle voie d’action déterminée par les pouvoirs publics), une autre de limiter la consommation de produits animaux et de privilégier la viande de qualité issue par exemple d’élevages les plus autonomes possibles dans leur système de production…

Sophie Valleix, responsable d'ABioDoc

Numéro 181 - Septembre 2012