Formation bio des nouveaux techniciens et enseignants

Les derniers chiffres présentés par l'Agence Bio lors d'une conférence de presse attestent de la dynamique du secteur de l'agriculture biologique en France : de fin 2008 à fin 2010, le nombre d'exploitations bio a augmenté de 55% et le marché de 32% ! Le Plan Barnier « Agriculture biologique : horizon 2012 » porte ses fruits. Parmi les différentes actions, ce Plan prévoit l'introduction d'informations relatives à
l'agriculture biologique dans toutes les formations de l'enseignement agricole, ainsi que la présence d'un technicien bio dans toutes les Chambres d'agriculture. Si les acteurs de la bio se réjouissent de cet élan, ils restent toutefois prudents sur la capacité d'une personne évoluant dans le secteur de l'agriculture conventionnelle à pouvoir, du jour au lendemain, enseigner ou conseiller en agriculture biologique. Cette thématique a d'ailleurs était longuement abordée lors de l'Assemblée générale de l'interprofession Auvergne Biologique, le 19 mai. En effet, ce qui fait la particularité de l'agriculture biologique n'est pas tant les produits phytosanitaires ou les engrais apportés qui diffèrent, que l'ensemble de la démarche qui relève à la fois de l'éthique, de la gestion de la ferme, de la conduite technique...

Face à un problème agricole technique, un « bio » (agriculteur, technicien, enseignant...) ne va pas chercher tout de suite la solution technique, mais va s'interroger sur la raison qui l'a conduit à se retrouver face à ce problème, sur le contexte pédo-climatique, économique voire humain de la ferme, sur la conduite à modifier et les moyens à mettre en œuvre pour éviter de se trouver à nouveau confronté à cette difficulté, avant de se demander quelle solution immédiate apporter, celle-ci pouvant relever de l'apport d'un produit autorisé en bio ou au passage d'un outil, mais qui peut aussi aboutir, dans le domaine végétal, à la décision de sursemer ou de détruire la culture (en cas de risque pour les années suivantes, en termes de parasites ou d'adventices particuliers, par exemple) et de semer une autre culture à la place. Le raisonnement est identique pour de nombreuses décisions, y compris dans le domaine économique. Certaines personnes de l'agriculture conventionnelle sont proches de ce raisonnement mais ont néanmoins besoin de se former et de rencontrer des acteurs de la bio pour être efficaces vis-à-vis de l'agriculture biologique. Dans certaines régions où le nombre de personnes évoluant en bio est limité, les attentes sont fortes en terme de conseil agricole, à la fois dès la formation des jeunes et des moins jeunes, mais aussi sur le terrain, où les personnes présentes dans les structures d'accompagnement ont parfois plus un rôle d'animation que de conseil. Cela d'autant plus que le nombre d'agriculteurs bio a presque doublé en trois ans et que nombre d'entre eux sont en conversion. De plus, les techniciens bio ont souvent en charge l'ensemble des productions de leur secteur géographique et ne peuvent être spécialisés que dans certaines d'entre-elles. Le nombre de techniciens n'ayant pas forcément suivi celui des conversions, les agriculteurs qui viennent de passer en bio ont parfois beaucoup de difficultés à disposer d'un conseil personnalisé. Néanmoins, les acteurs de la bio insistent sur la nécessité de formation de ceux qui sont amenés à enseigner ou à conseiller dans le domaine de l'agriculture biologique et cette exigence devrait aussi concerner les nouveaux agriculteurs bio, afin qu'ils participent à des réunions, à des rencontres ou à des formations, pour éviter qu'ils se retrouvent seuls face à leurs problèmes et baissent les bras... Rappelons que la documentation est aussi un moyen de se former et de s'informer et qu'elle est l'un des outils du panel de sources d'information existant.

Sophie VALLEIX, Responsable d’ABioDoc

Numéro 166 – Avril 2011