Perspectives pour l’agriculture biologique

Le salon de l’agriculture, qui s’est tenu début mars à Paris, a permis comme chaque année de nombreuses rencontres. Assurer une permanence à l’espace informatif du stand de l’Agence bio est en effet instructif. Au fil des ans, les interrogations du public se sont faites plus précises, moins polémiques, avec des gens curieux ou porteurs de projets très divers. A côté des questions prévues par les documents disponibles (liste de formations, derniers chiffres de la bio, démarches à suivre pour la conversion…), certaines interrogations sont plus subtiles ou plus ambiguës, telles que « Lors d’une formation à la conversion, un vétérinaire homéopathe nous a dit que seule l’approche uniciste relève de la vraie homéopathie, qu’en pensez-vous ? ». Les discussions débordent parfois sur la faim dans le monde, les moyens ou leviers pour la combattre…

Le salon, c’est aussi le rendez-vous avec le séminaire de l’Agence Bio. Deuxième occasion de prendre le pouls de la bio, du côté des spécialistes cette fois-ci. En 2009, la hausse des surfaces bio en France a représenté 11% à 35% selon les régions, parmi lesquelles 7 ont connu plus de 1000 conversions. En PACA, la surface en bio atteint presque 10% des surfaces agricoles, le Languedoc-Roussillon est à plus de 6%.

Concernant le marché, Elisabeth Mercier, directrice de l’Agence Bio, a estimé que l’offre bio française en vin, bovins, ovins, caprins, œufs et volailles était actuellement suffisante, que celle en lait et céréales connaissait encore quelques manques, et que celle en fruits et légumes et en épicerie sèche était encore insuffisante, certains produits étant cependant d’origine exotique.

Les chiffres montrent que l’Europe a totalisé 7,7 millions d’hectares en 2008 et 194 000 fermes bio. L’Espagne est devenue le premier pays, avec une surface bio contrastée, composée de zones de pâture peu productives et de zones de fruits et légumes. L’Allemagne a connu une stagnation de la valeur du marché alimentaire des ménages en produits biologiques, sauf en magasins spécialisés où les ventes ont connu une petite hausse (2 à 4 %). Néanmoins, Mme Mercier a déclaré que tous les experts qu’elle a rencontrés estiment que le rythme de croissance des produits bio devrait reprendre après la crise économique.

Urs Niggli, directeur du FiBl, en Suisse, s’est interrogé sur les perspectives de l’AB. Selon le rapport du Millennium Ecosystem Assessment (2005), certains scénarios estiment qu’il est possible de produire suffisamment en agriculture pour les usages nécessaires, sans polluer l’environnement et sans accentuer le changement climatique. Néanmoins, ces scénarios supposent des changements dans les domaines politiques, de la recherche, etc. Changements qui ne sont, selon les auteurs du rapport, en cours nulle part dans le monde… Urs Niggli a ensuite listé les études qui montrent l’intérêt du bio pour l’environnement (biodiversité…), le changement climatique (stockage du carbone…). Pour bénéficier au mieux des intérêts de l’AB, Jean-François Hulot, de la Commission européenne, a rappelé que la place de la bio dans la PAC post-2013 se négociait dès maintenant et qu’il était important de faire des propositions avant l’été…

Sophie VALLEIX, Responsable d'ABioDoc

Numéro 154 – Mars 2010