Recherches en bio : n’oublions personne !

Les deuxièmes Assises de la recherche en agriculture biologique, organisées par l’ITAB, se sont tenues à Paris les 30 et 31 mars 2011. La recherche en AB est souvent une recherche systémique, qui combine approche globale et approche analytique, en prenant en compte des interactions et des connexions entre différentes disciplines. Ainsi, elle nécessite d’introduire des passerelles entre disciplines mais aussi de multiplier les partenariats.

La nécessité d’impliquer des agriculteurs dans la définition et la conduite des programmes de recherche était une préoccupation largement partagée par les participants à ces Assises, tout en sachant que c’est déjà le cas, depuis longtemps, pour des chercheurs intervenant en agriculture biologique. En effet, les agriculteurs et les techniciens amènent leur expertise de terrain, les expériences innovantes et leur analyse des besoins. De leur côté, les chercheurs amènent leur expertise scientifique et la connaissance des modèles et des techniques d’expérimentation. La rencontre des deux compétences est fructueuse, à condition toutefois que les différents milieux apprennent à se comprendre et à avoir des visions similaires du projet de recherche en cours. En effet, le regard d’une personne oriente ce qu’elle perçoit, ce qu’elle interprète, selon son mode de pensée et ses expériences. D’où l’importance que chacun des partenaires soit ouvert et réceptif au mode de pensée de son interlocuteur, à la fois les chercheurs envers les personnes de terrain mais aussi réciproquement.

Cependant, le partenariat ne doit pas s’arrêter à un binôme chercheur/ personne de terrain et doit intégrer d’autres partenaires en fonction du type de recherche suivi : des naturalistes pour l’étude des agro-systèmes ou les approches territoriales, des consommateurs pour l’agro-alimentaire, etc. Ces derniers ne sont pas, selon certains chercheurs, suffisamment impliqués dans les programmes de recherche en général et ont tendance à faire aveuglément confiance aux choix qui sont décidés. Or, même si leur regard semble parfois décalé, les consommateurs sont représentants de la société civile et devraient aussi donner leur avis sur les orientations de la recherche. Concernant l’agriculture biologique, vu qu’ils étaient à l’origine du mouvement, ils doivent encore plus conserver leur mot à dire.

De même, les enseignants ne doivent pas être oubliés. Pour que les différents partenaires se comprennent dans un groupe, il faut parfois des « passeurs », personnes à l’interface entre plusieurs visions, notamment du terrain et de la recherche en l’occurrence. Les enseignants peuvent souvent jouer ce rôle, de même que certains animateurs, de groupements de producteurs ou de groupes de recherche par exemple.

Une certaine stabilité dans les groupes de recherche permet l’acquisition d’une culture commune et facilite le travail. Cependant, l’homogénéité peut parfois réduire l’innovation, d’où l’importance de rester ouvert à de nouveaux acteurs, mais aussi de prendre le temps et de disposer d’espaces et de moments pour la « réflexion libre ». Dans ces moments, les pièces du puzzle peuvent se mettre en place et les innovations (directions nouvelles à prendre, identification de nouveautés…) émerger dans notre cerveau parfois inondé par les pensées du quotidien…

Sophie VALLEIX, Responsable d’ABioDoc

Numéro 165 – Mars 2011